Navigation – Plan du site

AccueilNuméros31-32Crime et immigration dans l'Union...

Crime et immigration dans l'Union européenne

Monica den Boer

Entrées d’index

Géographique :

Union européenne
Haut de page

Texte intégral

1La coopération européenne en matière de justice criminelle s'étend aujourd'hui aux migrations, au crime organisé et au terrorisme1. J'aimerais, dans cette contribution, montrer à quel point ces domaines sont désormais reliés, et quelles en sont les conséquences pour la coopération judiciaire dans le cadre de l'Union européenne. Les problématiques dans le monde de la coopération internationale en matière de justice criminelle ont évolué à maintes reprises. Historiquement, on peut dire que deux formes de criminalité, le crime itinérant et les atteintes à l'ordre public, toutes deux liées à l'anarchisme, ont fortement encouragé la croissance des contacts judiciaires transfrontaliers, surtout à la fin du siècle dernier et au début de ce siècle. Une juridiction fragmentée - qui fut longtemps un obstacle aux tentatives de poursuite des suspects au-delà des frontières nationales - combinée avec une grande mobilité ont constamment servi d'arguments moteurs pour obtenir la normalisation des lois criminelles et le déploiement d'un effort stratégique commun dans la lutte contre le crime international. Mais, en termes de définition, le crime international peut être tout et n'importe quoi. A ce degré de généralité, il a seulement été possible d'appréhender le crime international comme une variable de la législation sur le crime2 , et comme une variable de " l'international ", impliquant le remplacement des définitions des lois criminelles nationales par des normes internationales. En dépit de lents progrès dans le domaine des poursuites transfrontalières, la mobilité et la fragmentation juridictionnelles sont aujourd'hui encore les deux moteurs de la coopération judiciaire internationale. Dès lors, la surenchère sur la perméabilité des frontières n'a pas seulement donné naissance à une Europe forteresse et à toute une série de mesures visant à compenser le déficit de sécurité, elle a également facilité le regroupement des questions criminelles autour de ces éléments fondamentaux, entraînant l'affaiblissement des anciennes répartitions de catégories de crimes. Ainsi, bien que l'immigration, le crime organisé et le terrorisme relèvent de différents groupes de travaux au sein du Troisième pilier3 , on assiste aujourd'hui à l'effacement discursif, organisationnel et instrumental de cette distinction4 . Désormais, ces trois domaines tendent donc à être en contact étroit sous prétexte d'une dimension internationale. C'est pourquoi, cet article s'ouvre sur une discussion des relations entre sécurité intérieure et extérieure. Par la suite, j'examinerai certains des concepts du discours juridique sur le crime, notamment la relation du crime à l'immigration, en considérant que l'interaction entre la communauté académique des criminologues et les juristes partisans du durcissement des lois joue un rôle important dans le renforcement mutuel des concepts, des cadres et des stratégies. Afin d'analyser cette relation, j'identifierai certains thèmes de recherche fondamentaux, qui ont aidé les criminologues à trouver des réponses aux questions concernant la relation entre l'immigration et le crime. A cet égard, je ferai de fréquentes références à des exemples offerts par la recherche néerlandaise, mais le but de cet article est de situer le débat sur le crime et l'immigration dans le contexte actuel de la politique de construction de l'Union européenne.

2L'émergence d'une sécurité à la fois intérieure et extérieure En sus de l'imposition de plus de cohérence et de structuration des différentes initiatives de renforcement de la loi en matière de coopération policière transfrontalière, le Troisième pilier institue un lien entre les domaines relevant de la sécurité, comme la politique du droit d'asile, les contrôles aux frontières extérieures, la politique de l'immigration, la toxicomanie, la fraude, la coopération judiciaire civile et criminelle, la coopération douanière et policière, aux fins de " prévenir et de combattre le terrorisme, le trafic de drogue et d'autres formes graves du crime international ". Ici, le Troisième pilier relie et coordonne des initiatives de renforcement juridique concernant des domaines très vastes. C'est une conséquence des stratégies floues de renforcement juridique ; aujourd'hui, c'est une approche beaucoup plus générale du crime qui domine, alors qu'autrefois, les crimes étaient classés et abordés par catégories bien distinctes.

3L'émergence d'une interpénétration entre sécurité intérieure et extérieure a aussi joué un rôle essentiel de catalyseur dans la connexion horizontale entre les différentes catégories de crimes5 . La fin de la Guerre froide a supprimé tout exposé raisonné à propos d'une demande plus forte de sécurisation interne6 . Alors que l'Europe démantelait ses défenses contre le communisme, elle commencé à se croire menacée par un ennemi intérieur7. Le danger extérieur s'est transformé, et ce glissement du régime communiste à l'immigration et au crime organisé, a focalisé l'attention sur des menaces à la sécurité interne provenant de l'extérieur. Comme les accords internationaux de sécurité incluent de plus en plus en le facteur de migration8 , trois modalités ont permis d'amalgamer l'immigration et le droit d'asile à la sécurité intérieure.

4La première est idéologique : les agences européennes prônant un renforcement légal ont redéfini les menaces à la sécurité intérieure. On a substitué à la menace du communisme une menace extérieure fondée sur l'immigration massive, le crime organisé et le terrorisme importé (par exemple le PKK kurde), tous étant plus ou moins reliés à une déstabilisation sociale, économique ou politique9 . La seconde est instrumentale. Les ministères de la Justice et de l'Intérieur des Etats membres de l'Union européenne ont négocié l'établissement de mesures compensatoires et d'instruments de contrôle. Les systèmes internationaux d'information (SIS, SIE), les systèmes d'empreintes, les sanctions aux transporteurs et les systèmes de visas sont des exemples frappants de systèmes de contrôle multifonctions10 . Il est significatif que de tels instruments, utilisés pour le contrôle des migrations et de l'asile, puissent être aussi utilisés pour le contrôle du crime11 . La troisième - que nous venons d'évoquer indirectement - consiste en une fusion institutionnelle, puisque les cadres institutionnels qui étaient d'habitude engagés dans une coopération policière internationale, comme Trevi et le groupe Ad Hoc sur l'immigration, ont été fondus dans le Comité de coordination, à la suite de l'article K.4 du Troisième pilier du traité de l'Union européenne. Ces trois modalités de création d'un continuum sur la sécurité intérieure ont une influence sur la sécurité à l'échelle nationale12 .

5Le crime organisé, les filières d'immigration clandestine et le terrorisme importé appartiennent à la grande criminalité et ont, en somme, masqué la criminalité ordinaire. Bien que la lutte contre la grande criminalité ait été instrumentalisée pour élargir l'échelle de l'organisation policière et pour assurer de nouvelles ressources et équipements, nombre de policiers font remarquer au contraire que la petite délinquance reste toujours la criminalité la plus visible au niveau local et qu'elle sape aussi les sentiments de sécurité et de stabilité des communautés. Ils affirment également que cette forme de criminalité est étroitement liée au contexte et aux occasions qui se présentent aux éventuels délinquants. Or, dans les discours politiques, il y a trop souvent une surenchère sur les menaces extérieures à la communauté, et bien souvent cette surenchère n'est qu'un outil rhétorique destiné à justifier la création d'agences de polices centralisées. D'un autre côté, cet argumentaire sera contesté par les criminologues et les officiers partisans du renforcement de la loi à l'échelle européenne, qui jugent la petite délinquance et la criminalité locale comme des extensions d'une infrastructure plus large (par exemple une économie globale de la drogue) 13 .

6La sécurisation et la criminalisation des immigrants par les européens Dès lors, une des stratégies policières les plus efficaces pour sécuriser et criminaliser les immigrants a été la minimisation de la distinction traditionnelle entre immigrants et réfugiés, processus qui s'est effectué par la différenciation entre les demandeurs d'asile qui cherchent à entrer sur le territoire d'un des Etats membres de l'Union européenne pour des raisons politiques (les " ingénus ") et les autres (les " faux " demandeurs d'asile) 14 , font désormais partie du discours sur l'immigration, et ce fait a joué un rôle important dans la labellisation négative des demandeurs d'asile. Ensuite, le renforcement de l'attention sur les délits propres à l'immigration, comme les séjours prolongés au-delà des dates permises, ont eu pour résultat de durcir la pénalisation, qui se reflète fortement sur des problèmes comme la résidence sans permis, les permis de travail, le logement et l'emploi illégal, les bénéfices sociaux illégaux. Ces tendances ont été renforcées en raison d'un sentiment de responsabilité envers les pays voisins, membres de l'UE. Finalement, et c'est le comble de l'ironie, l'évolution des attitudes xénophobes dans les sociétés occidentales, à l'égard des immigrants et des demandeurs d'asile, ainsi que l'accentuation des répercussions négatives de la xénophobie pour la sécurité intérieure des Etats membres de l'UE15 , ont agi comme une justification idéologique pour prendre plus de mesures restrictives et d'exclusion, non contre les xénophobes, mais les immigrés ! L'absence d'un effort coordonné pour miner l'opinion largement répandue, qui fait de l'immigrant un concurrent redoutable dans la redistribution, étonnamment réduite, de l'emploi et du Welfare, fait partie de cette stratégie de sécurisation : à cet égard, le silence est aussi une parole.

7Le discours sur la nécessité du renforcement de la loi Ces " tournants " discursifs sont largement soutenus par la perception mystificatrice selon laquelle les minorités ethniques seraient impénétrables, en raison de leurs langues, de leurs codes de valeurs incompréhensibles, et de leur loyauté de groupe16 . L'image du délinquant ethnique, membre d'une " société dissimulée " en sort renforcée. La stratégie d'exclusion, de différenciation et l'isolement (utile) des problèmes criminels dans la société ne s'appliquent plus à l'individu, mais à l'ethnie. En particulier, l'usage nouveau de termes comme " yardies " pour désigner les gangs d'origine jamaïcaine spécialisés dans le trafic de cocaïne est une illustration de cette stratégie isolationniste, qui encourage la ségrégation spatiale dans les quartiers urbains (" no-go areas ") 17 . L'impénétrabilité supposée des groupes ethniques encourage la stigmatisation et la criminalisation des immigrants en général, et échoue à affaiblir le lien, de plus en plus commun, entre crime et ethnicité en Europe. Comme les immigrants sont connectés avec le terrorisme d'importation, le crime organisé et les émeutes urbaines, ils sont perçus de plus en plus comme une menace à la sécurité intérieure des Etats d'Europe de l'Ouest. Cette vision de sens commun appelle pourtant une discussion de fond, sur la relation entre le renforcement des lois européennes et la discipline criminologique, qui a une responsabilité certaine dans la connexion entre crime et migration. Regardons de plus près les affirmations énoncées avant 1990 par des responsables officiels de quelques pays. Au Royaume-Uni, au début des années 1970, " agression " était devenue virtuellement synonyme de " criminalité noire " 18 . Cette équation est encore populaire aujourd'hui et a été reprise dans d'autres pays. Par exemple, le commissaire Nordholt de la police d'Amsterdam, a soutenu que la moitié des agressions et des vols était le fait de jeunes d'origine antillaise et surinamoise, en raison du chômage de longue durée19 . L'ancien président du BKA, Zachert, se référant aux statistiques allemandes de 1991, a affirmé que le pourcentage d'étrangers était " très élevé " pour certaines catégories de crimes, notamment le vol à la tire et les agressions de rue. Il " expliquait " ces occurrences criminelles par les différences socio-économiques entre " Allemands ethniques " et étrangers, et par une logique culturelle différente (par exemple dans les querelles et les situations conflictuelles) propre aux étrangers. Il relie aussi les problèmes de crime organisé aux activités internationales des groupes italiens et à la mafia russe, le trafic d'héroïne aux familles turques, la production de drogues de synthèse aux groupes polonais et d'Europe de l'Est, et le crime à motivations politiques aux groupes extrémistes turcs, kurdes, arabes et iraniens, issus de ces communautés20 . Les Européens, qu'ils soient Britanniques, Allemands, ou Néerlandais, suivent en cela les thèses américaines. En effet, aux Etats-Unis, le crime organisé a été fortement associé aux groupes ethniques ou immigrés. Ronald Goldstock21. distingue, par exemple, les groupes suivants : les groupes d'immigrés appartenant à des communautés ayant un antécédent d'organisations criminelles (Cosa Nostra) ; les groupes minoritaires urbains fondés sur la drogue (noirs et hispaniques) ; les groupes fondés sur les gangs (Bandidos) ; les groupes ethniques multi-criminels (Russes, Cubains, Israéliens et Irlandais) ; les groupes extérieurs fondés sur la drogue (Colombiens) 22 . Les facteurs d'explication qui sont le plus souvent avancés sont : l'urbanisme, l'exclusion socio-économique, le chômage et des comportements et des normes culturelles différents23 . Certaines publications et énoncés des administrations partisanes du renforcement des lois répressives révèlent une préconception du crime ethnique, qui serait affaire " d'automatisme ", ou de réponse naturelle à un environnement et des circonstances de vie24 . Mais qu'en est-il ?

8Le discours criminologique justifiant crime et ethnicité D'une manière générale, les criminologues fournissent une information " politiquement pertinente " aux partisans du renforcement de la loi, particulièrement dans le domaine de la coopération policière européenne où il existe une interaction intime entre les communautés universitaires et les exécutants ; interaction ou collusion renforcée par le fait que les participants des réseaux politiques possèdent souvent les deux expériences, académique et opérationnelle. La plupart des criminologues s'accordent en effet sur l'implication assez importante des minorités ethniques dans le crime - contrairement aux spécialistes de science politique - ce qui n'empêche pas leurs explications de diverger. Le débat entre les criminologues néerlandais s'est concentré, par exemple, sur l'effet positif ou négatif de l'intégration familiale sur le comportement criminel des jeunes des minorités ethniques, et si certains s'en tiennent à une explication restreinte, d'autres en promeuvent une plus large, où l'intégration familiale est replacée dans son contexte social25 . Il n'y a donc pas consensus. Néanmoins, le crime dans les communautés ethniques ou étrangères est devenu, grâce au débat, un sujet " acceptable " pour les analyses criminologiques, au moins pour celles entreprises aux Pays-Bas26. Le tabou sur la relation entre les communautés ethniques ou étrangères et le crime organisé semble avoir disparu. Le professeur Andreas Bovenkerk, principal responsable de la description et de l'analyse de l'implication des ethnies dans le crime organisé néerlandais a reçu les compliments du président de la Commission parlementaire d'enquête sur la police parallèle, Marten van Traa. Ce dernier notait que Bovenkerk " a brisé en profondeur le tabou du crime au sein des communautés ethniques, sans les stigmatiser. C'est un résultat considérable. La police et les magistrats ayant prêté peu d'attention au crime organisé au sein des communautés surinamoise, turque et marocaine, installées aux Pays-Bas27 ". A contrario des félicitations de Marten van Traa, les premières réactions des organisations et des médias des communautés ethniques, ont démontré que l'affirmation de Andreas Bovenkerk, selon laquelle une partie non négligeable de la population turque masculine d'Amsterdam était impliquée dans l'économie de la drogue avait néanmoins été perçue comme choquante. De plus, cela soulignait l'échec des précédentes tentatives de décriminalisation de la population immigrée28 .

9Les criminologues qui étudient le crime organisé dans les communautés ethniques sont donc confrontés à un dilemme : s'ils n'analysent pas la relation entre crime et migration, ils ont conscience que leur travaux demeurent incomplets ; s'ils l'analysent, on leur reproche facilement de véhiculer des préjugés racistes sur le lien entre crime et ethnicité. Les criminologues sont donc obligés de justifier la distinction opérée entre groupes " autochtones " et " ethniques ", et d'alléguer qu'ils ne cherchent pas, pour autant, à criminaliser la population immigrée29 . Nous allons analyser plus en détail les conséquences d'une telle position épistémologique.

10Le crime considéré comme un mal importé Les immigrés sont très souvent perçus comme des ennemis de la stabilité sociale, politique, économique des sociétés industrialisées. Or, en utilisant l'inégalité d'occasions30 comme un modèle explicatif, les criminologues ont réorienté leur attention sur les groupes " souterrains ", les groupes de personnes imparfaitement intégrées dans les sociétés occidentales, qui maintiennent l'usage de leur langue et de leur culture et reconstituent leur propre micro-économie. Ils concourent dès lors, comme P. C. van Duyne31 l'a bien saisi, à faire percevoir le danger criminel comme émanant de groupes de " l'extérieur ", ce qui les conduit à opposer le Nous (autochtones) à Eux32 (étrangers), ou le Bien au Mal. Ils s'appuient sur le double rejet du crime et de l'extérieur. Le crime est une menace à la communauté, ou vice versa, la perception de la menace criminelle est ce qui renforce la cohésion interne de la communauté. Dans un groupe de nations, qui, en dépit de son association au sein d'une Union européenne, rassemble un éventail très large de cultures et de langues, il n'est guère surprenant qu'une mise en relief politique du déficit de sécurité puisse agir comme un élément d'unification contre l'Autre.

11L'immigré est, au sens hegélien du terme, un sujet identifiable qui représente une menace à la communauté (imaginée). Jef Huysmans note : " Le conte de la sécurité (…), parle de " nous ", des " étrangers ", mais également d'une identité collective insécure qui unit les individus insécures33 ". Cette attitude primaire peut se transformer en une politique de justice criminelle active, dans laquelle il devient légitime d'exercer de la violence sur l'étranger (appliquer, par exemple, des sanctions telles que l'expulsion34 ). Le hors-la-loi, le non-conformiste qui commet un crime génère un sentiment de communauté (" voir l'Autre est une forme d'auto-production " 35 ). Il doit être (symboliquement) expulsé de cette communauté, " du fait que l'existence réelle de la communauté est fondée d'abord sur l'expulsion symbolique continue " 36 .

12La Déclaration de la GOMERA37 sur le terrorisme, qui a été rendue publique l'année dernière par les Etats membres de l'UE introduit, par exemple, le concept de fondamentalisme, en l'opposant à l'Europe démocratique. Ce changement sémantique qui remplace " l'ancienne " menace terroriste, signale en même temps la construction d'une identité européenne par l'accentuation de la différence. L'ego - l'identité européenne - est (re)construit par une confrontation avec une culture nouvelle et non familière38 , et cette " différenciation définie culturellement " s'exprime alternativement par l'usage des termes de " fondamentalisme, fondamentalisme islamique, islamisme " 39 . Ces politiques de différenciation ont cependant échoué et n'ont pas su maîtriser la formulation d'une identité de sécurité, pas plus qu'elles n'ont pu fournir de stratégie unifiée contre les menaces de nature terroriste. La menace du terrorisme " d'importation " 40 (comme le fondamentalisme islamique) est encore directement dirigée contre les gouvernements nationaux des Etats membres, plutôt que contre l'ordre de l'Union européenne. Les " sécurités " intérieures des Etats membres ne font pas simplement qu'ajouter à la sécurité intérieure de l'UE. Les niveaux de menaces diffèrent sensiblement, et l'origine de la menace terroriste est encore liée aux idiosyncrasies d'un Etat membre (un passé colonial, ou une division territoriale de la gouvernance, ou encore des communautés immigrées spécifiques). La combinaison entre l'empressement des Etats membres à s'entraider quand le terrorisme est traité dans un contexte de sécurité intérieure plutôt fragmenté conduit à une situation paradoxale, à savoir que le sens d'une idéologie anti-terroriste uniforme ne débouche pas sur un mécanisme de combat harmonieux et fonctionnel. Un parfait exemple en est la polémique qui éclata entre les gouvernements espagnol et belge après une décision du Conseil d'Etat belge de ne pas extrader vers l'Espagne deux Basques qui avaient hébergé des terroristes de l'ETA. Il y a un contraste aigu entre la volonté de définir une stratégie uniforme contre le terrorisme et la dysharmonie régnant entre la police et les autorités judiciaires au cours de l'étape pratique de la coopération. Le manque d'un concept (commun) de sécurité démontre que l'objet référent (l'Etat) 41 n'a pas encore été remplacé par celui de l'Union. Cela pose la question de savoir si l'Union européenne peut vraiment devenir une communauté de sécurité42, et jusqu'à quel point. Le remplacement de " l'Etat constituant " par une " Union européenne constituante " nécessite une rupture avec les formules traditionnelles et familières de l'action de l'Etat.

13Barry Buzan a fait remarquer que si les Etats d'Europe de l'Ouest admettent leur incapacité à remplir, à cause de l'interdépendance, de nombreuses fonctions économiques et de défense, ils sont réticents à abandonner leur souveraineté dans les questions de sécurité43 . Pour fonctionner comme une communauté de sécurité, les Etats membres de l'Union européenne devront résoudre nombre de questions fondamentales touchant la conceptualisation de la sécurité. La première concerne la cohérence de la politique de justice criminelle : devra-t-elle avoir une orientation à dominante répressive ou préventive ? 44 . La seconde question concerne l'interprétation des " dangers de la sécurité intérieure " : qu'est-ce qui constitue une raison suffisante pour restaurer les contrôles frontaliers (internes), par exemple ? Enfin, il existe une incertitude sur les conséquences de l'élargissement de la communauté sur la cohésion de l'Union en tant que communauté de sécurité45 . Ces questions, non posées par les criminologues, nous amènent à nous interroger sur la pertinence de leurs catégories d'analyse.

14Le crime et ses liens avec la mobilité Le crime est mouvement. Mais les criminologues et les partisans du renforcement de la loi ont du mal à le catégoriser, ce que démontre la quête sans fin d'une définition du crime organisé. Le nomadisme du crime déclenche l'inquiétude46  ; car en l'absence de définition sûre, comment définir des stratégies et des politiques ? L'inquiétude trouve sans doute sa cause dans l'incompréhension du phénomène de la fluidité du crime. Les incompréhensions linguistique et culturelle sont ainsi perçues comme des handicaps épistémologiques dans le combat effectif contre le crime. Mais cette notion de nomadisme du crime est liée, chez les criminologues, à une thèse qui dérive tout droit de l'économie politique : les migrants possèdent une infrastructure toute prête pour rapatrier les profits criminels vers les pays d'origine ; leur (sous-)économie de restaurants et de commerces facilite le blanchiment d'argent, etc. Selon eux, " l'évolution du village global a modifié fondamentalement le contexte dans lequel les affaires légitimes et illégitimes opèrent, et a ouvert des possibilités sans précédent au crime transnational. L'interdépendance accrue entre les pays, les facilités des communications et des voyages internationaux, la perméabilité des frontières nationales et la globalisation des réseaux financiers ont créé des marchés globaux pour les produits licites et illicites47 ". Un mélange de concepts sociologiques, culturels, économiques - comme les relations en réseau, les relations familiales et les mouvements de l'économie globale - est alors utilisé pour expliquer le crime international organisé. Quand on utilise ces concepts, cinq relations sont mises en avant. La première est la relation entre le pays d'origine et le pays de résidence, et donc (à travers le trafic de drogue) entre le constituant illégal et le constituant légal. Le constituant illégal est formé par la production de produits illégaux et par une gouvernance de type mafieux, qu'encourage la présence d'une gouvernance faible. La seconde est la relation entre le profit (réalisé dans le pays de résidence) et l'investissement (le pays d'origine). La troisième est la mobilité (voir au-dessous) entre le pays d'origine et le pays de résidence : les relations familiales rendent nécessaire le voyage, et on considère qu'il est la couverture du trafic48 . La quatrième réside dans le manque d'intégration (sociale et économique) dans le pays de résidence qui offre des possibilités d'activités criminelles financièrement bénéficiaires pour ses protagonistes49 . Enfin, on suppose que le crime (ethnique) organisé est facilité par une sous économie à laquelle ne prend pas part la population autochtone. Ces arguments " d'autorité " sont pour autant tous discutables. Ils ne tirent leur force que de l'usage non réfléchi des corrélations faites par les services de police.

15L'usage des données policières par les criminologues Les criminologues qui veulent faire une analyse empirique du crime doivent souvent se reposer sur les données policières. L'analyse du crime, et particulièrement du crime organisé n'est pas chose facile pour eux. Cette difficulté est en partie due à la faible visibilité de la victimisation qu'entraîne le crime organisé. Les enquêtes sur les victimes ne sont donc pas considérées comme très utiles à l'analyse du crime organisé. A l'autre extrémité, le crime organisé se ferme à l'extérieur et " resserre ses rangs " 50 . Après quelques réticences initiales de la police, les données policières ont été ouvertes aux chercheurs. Ces informations sont néanmoins sélectives, à l'exemple de la police néerlandaise, qui a investi beaucoup d'énergie dans la collecte de renseignements sur le trafic turc de l'héroïne, alors que l'on en sait beaucoup moins sur les groupes chinois impliqués dans le marché de la drogue. Les sources policières sont donc sélectives, voire parfois douteuses51 .

16Les renseignements de la police sont certes suffisants pour la compréhension du mode de recrutement par les réseaux étrangers de membres de communautés ethniques plus ou moins intégrés. En d'autres termes, on en sait beaucoup sur les " sans grades " des réseaux du crime organisé, mais très peu sur ceux qui sont en position de coordonner l'activité criminelle. J. Fiselier52 note à propos de l'information de la police, qu'elle concerne pour l'essentiel les réseaux surinamois, turcs et marocains, mais que cette information est tout à fait insuffisante quand il s'agit des opérations de blanchiment d'argent du crime organisé dans lesquelles sont impliqués des groupes étrangers.

17Andreas Bovenkerk met bien en évidence le fait que la police utilise maints critères de sélection, mais il n'en tire pas toutes les conséquences53. Tout d'abord, si la police possède une bonne connaissance des crimes qui sont l'objet d'une pression sociale et politique forte, il n'en est pas de même pour les crimes qui ne génèrent que peu d'intérêt. Elle appréhende bien mieux les crimes dont l'élucidation réclame moins de temps et de matériel humain que ceux, plus laborieux, qui nécessitent un savoir-faire spécialisé (par exemple la délinquance financière). Finalement, la police dispose de beaucoup plus d'informations sur les crimes qui, une fois résolus génèrent, pour elle, de bons résultats et de la réussite. Aux Etats-Unis, la tendance va même jusqu'à donner la priorité à l'élucidation des crimes qui génèrent un revenu financier pour l'Etat (par les procédures de confiscation). Dans le contexte hollandais, il est apparu que l'une des conséquences de l'usage des données policières était la forte mise en relief de la criminalité liée à la drogue ; l'information rassemblée par la police est " intoxiquée " ! Tant que les organisations partisanes du renforcement de la loi auront comme priorité cette criminalité, les groupes non-autochtones figureront beaucoup plus dans les statistiques et les rapports sur le crime54. Se concentrer sur le marché des stupéfiants implique que le trafic turc de l'héroïne prendra une importance disproportionnée55 . Ceci ne veut pas dire qu'il faut nier le fait que l'importation et le trafic des drogues soient pour l'essentiel entre les mains des Turcs, qui, numériquement, constituent une population immigrée très importante aux Pays-Bas et en Allemagne. Mais D. J. Korf56 a noté que l'établissement sélectif des priorités policières aux Pays-Bas n'était pas lié à l'échelle de la consommation (la cocaïne est beaucoup plus consommée que l'héroïne), ni à la gravité de l'infraction et au profit retiré, mais au fait que la consommation d'héroïne entraîne bien plus de problèmes de santé et d'ordre public, et a donc un attrait politique plus fort. Il faudrait donc que les criminologues tiennent compte du fait que la production des statistiques policières dépendant des jeux politiques.

18De la catégorisation de l'immigration illégale comme un crime Les lois sur l'immigration ne peuvent naturellement être enfreintes que par des étrangers. En même temps, nous savons que dans certains Etats membres de l'Union européenne, les infractions aux lois sur l'immigration figurent dans les statistiques criminelles, et du coup révèlent une participation disproportionnée des étrangers aux activités criminelles. Il existe nombre de catégories de délits qui ne concernent guère que des étrangers. Une première catégorie inclut, par exemple, la résidence dans un pays après l'expiration d'un permis de séjour ou de travail, des réclamations illégitimes et des bénéfices sociaux reçus par des immigrants illégaux57 , l'emploi clandestin58 ou le logement d'immigrés sans permis valable59 . Une seconde catégorie inclut les infractions liées aux fraudes à l'état civil (documents d'identité, mariages blancs). Ces deux groupes d'infractions sont de plus en plus les points de mire de l'actualité. Les infractions à l'état-civil sont perçues comme connectées aux mouvements des personnes. Les statistiques sont impressionnantes : en 1993, on a estimé qu'en Allemagne, " 80 % des certificats indiquant qu'une personne était célibataire plutôt que mariée, et produits par des personnes originaires des pays du Tiers-monde, étaient des faux ou de vrais/faux documents, ces derniers étant établis par des officiels habilités, en échange d'une somme d'argent (documents de complaisance) " 60 . En comparaison, aux Pays-Bas, on a estimé que " 30 % des mariages où l'un des partenaires au moins était étranger, étaient frauduleux " 61 . Bien pire : " les délits à l'état-civil appartiennent à la catégorie du crime organisé : il existe des intermédiaires professionnels spécialisés dans la production de documents faux, ou dans l'arrangement de mariages blancs " 62 . Ironie de l'histoire, l'introduction de contrôles plus stricts de l'immigration dans l'Union européenne pourrait avoir contribué au " boom " de l'industrie des faux papiers. Enfin, il existe une troisième catégorie (très proche) du trafic des êtres humains, qui a figuré récemment sur l'agenda du Troisième pilier, avec une certaine fréquence. Le résultat de cette attention politique aura été de placer ce type de crime organisé international sous le mandat des unités anti-drogues d'Europol. En outre, des unités spéciales de police ont été créées et des discussions ont porté sur la mise en place de garde-côtes européens, comme si tout venait de l'extérieur ! Mais tel n'est pas le cas. Il y a absence de réflexion sur les frontières et les distinctions entre autochtones et étrangers ethniques.

19Si l'on veut mieux comprendre la relation crime-migration, il faut rappeler que, dans le discours criminologique, l'immigration et le crime (international et organisé) partagent trois caractéristiques. D'une part, ce sont des phénomènes fluides et mobiles, qui ignorent les frontières. Ces phénomènes sont largement encouragés par les opportunités qu'apportent le déséquilibre économique et social entre les régions et les Etats63 . Ensuite, cela implique qu'ils soient perçus comme des menaces émanant de l'extérieur de la communauté (stable et prospère) : le but d'un membre d'une organisation criminelle et d'un immigrant sont perçus comme deux éléments confluents, consistant essentiellement en l'optimalisation du bénéfice personnel. Enfin, on considère que le crime et l'immigration sont des phénomènes qui ont pénétré le cœur des sociétés occidentales. Leurs conséquences négatives sont appréhendées comme celles d'un virus qui se répand avec une capacité perpétuelle de mutation et, donc, requérant une adaptation constante des stratégies de renforcement de la loi. La menace externe est transformée en une menace endémique venant de l'intérieur. Comme Phil Williams le note : " Les réseaux ethniques rendent difficiles aux gouvernements l'identification des menaces externes et internes posées par les organisations criminelles transnationales et terroristes " 64 . Les membres des communautés immigrées impliqués dans des activités criminelles sont regardés comme " intouchables ", puisqu'il est inacceptable du point de vue idéologique de stigmatiser des criminels avec un arrière-plan ethnique. Cet argument donne lieu à une prophétie auto-réalisatrice. Comme nous l'avons déjà fait observer, les agences partisanes d'un renforcement des lois trouvent difficile de rassembler des informations et de pénétrer " la sous-culture ethnique " 65 . Il en résulte une curieuse confluence entre la tolérance des activités criminelles, la construction d'un mythe et le manque de confiance sur les activités normales des immigrés.

20Le contexte structurant de l'Union Européenne La perception du crime organisé et de l'immigration comme de nouvelles " menaces " à la communauté imaginée de l'Union européenne a été instrumentalisée pour définir des politiques répressives et d'exclusion aux niveaux national et supranational. Même si des lois restrictives sur le droit d'asile ont fait baisser considérablement le nombre des demandeurs, un sentiment de " crise " prévaut toujours parmi les Etats membres de l'Union. Grâce à la structure intergouvernementale du Troisième pilier, sont mis en place des instruments légaux, parfois ad hoc, qui ne sont pas légalement contrôlés et qui ne nécessitent pas une approbation parlementaire dans les Etats membres. Il est frappant de constater que ces instruments se sont développés pour contrôler et gérer l'immigration et l'asile, perçus également comme des menaces à la sécurité intérieure de l'Union européenne66. On a introduit ou on a renforcé les contrôles intérieurs et les instruments du contrôle international67 . Les contrôles intérieurs comprennent l'introduction de cartes d'identité et l'identification obligatoire dans certaines situations ; l'introduction et/ou le renforcement des enregistrements dans les hôtels ; l'introduction et/ou le renforcement des contrôles de l'emploi ; l'usage accru du renseignement et d'équipements de détection ultramodernes, comme les détecteurs de chaleur, des équipements de vision de nuit, des Security laminate verifiers et des comparateurs vidéo-spectraux68  ; une coopération et des échanges d'informations accrus entre agences ; l'introduction de pouvoirs de police de plus en plus forts en vue d'un système élargi de contrôles internes. Les instruments internationaux du contrôle incluent l'introduction de banques de données informatisées (Schengen Information System, et l'European Information System) ; la prise des empreintes digitales des réfugiés, qui seront éventuellement centralisées et stockées dans l'EURODAC ; l'introduction et/ou le renforcement des sanctions aux transporteurs, la coopération technologique entre les agences et les Etats membres en vue de combattre l'immigration illégale ; la création d'unités spéciales de police et de forces de surveillance contre les trafiquants d'êtres humains ; les séminaires bimensuels du groupe de travail du Troisième pilier sur les faux documents.

21La forte corrélation entre les jeunes des communautés ethniques et le crime a été utilisée comme un outil pour justifier l'introduction de mesures plus restrictives de contrôle de l'immigration ou des immigrants (contrôles d'identité, renseignements d'ordre personnel). Le point essentiel de cette argumentation est fondé sur la menace à l'ordre public ou à la sécurité interne d'une société, ce qui veut dire que les contrevenants peuvent être dans certaines juridictions légalement expulsés. Donc, les actes délictueux, la violation de la législation sur les étrangers, le crime, tout peut être utilisé pour justifier une expulsion. La politique d'ordre public est de plus en plus ciblée, comme on peut le démontrer à partir des expériences de Paris et Bruxelles. En général, les agences de police ont une tâche bien plus significative dans le contrôle de l'immigration qu'on ne le suppose. Les services d'immigration, les douanes et les agences qui contrôlent les frontières, ainsi que les forces de police régulières, sont toutes impliquées à divers stades du contrôle de l'immigration, certaines en première ligne - quand les immigrants entrent - et d'autres après l'arrivée des personnes dans le pays. Les officiers de police ont une compétence administrative (enregistrement), et un rôle de coopération (renforcement des lois sur l'immigration dans les domaines du logement et de l'emploi) en collaboration avec les services de l'immigration, mais là où les polices sont investies de fonctions administratives, elles conservent un certain niveau de discrétion. Au Danemark, la police des étrangers est responsable des criblages préliminaires ; en France, la Préfecture de police a pour fonction formelle de recevoir les demandes des réfugiés ; en Allemagne, chaque Land a sa propre politique en matière de police de l'immigration, aux Pays-Bas, la police royale militaire est responsable des contrôles aux frontières et en conséquence de l'accueil des réfugiés et des demandeurs d'asile ; en Suède, une police spéciale est responsable des demandes et des premiers interrogatoires sur les faits ; en Suisse, l'office fédéral de police et la Fremdenpolizei sont en charge du contrôle de l'immigration. Le contrôle de l'immigration et la police des frontières reposent donc entre les mains d'autorités disparates, ce qui peut avoir des conséquences sur l'efficacité du contrôle de l'immigration. On voit mal comment cette myriade de services et d'agences pourrait mettre en œuvre une coopération cohérente et consistante en qualité à un niveau international. Il convient à ce propos de noter que le Parlement européen a adopté en 1987 une résolution plaidant pour que la police n'ait que des pouvoirs d'inspection et de surveillance, tandis qu'une administration centrale aurait la charge de gérer l'ensemble des demandes d'asile69 ; ce qui établirait une séparation organisationnelle entre l'admission et la surveillance70 . L'extension des pouvoirs de police face à l'accroissement des pressions migratoires est problématique, si l'on pense aux attitudes discriminatoires qui existent au sein des forces de police européennes, à un moment où on requiert leur engagement contre un racisme et une xénophobie croissant presque partout en Europe71.

22Il est difficile pour les institutions européennes de revenir sur l'option " immigration zéro " qui a dominé les politiques nationales d'immigration au cours de ces dernières années. La faiblesse de la gouvernance de l'Union européenne est reliée au contexte intergouvernemental au sein duquel on aborde la politique de l'immigration, mais aussi au processus qui a fait passer le facteur immigration d'une politique socio-économique à une politique de justice criminelle dont l'orientation est de plus en plus répressive. Les " acquis " ou " building-blocks " des politiques restrictives et/ou répressives insistent sur l'exclusion des immigrants et des demandeurs d'asile plutôt que sur leur inclusion, phénomène visible avec l'établissement d'accords de réadmission avec les pays d'Europe de l'Est, la mise en place d'une politique commune des visas parmi les Quinze, le retour des demandeurs d'asile indésirables vers les pays tiers " sûrs " 72 , et un usage accru de l'expulsion. Bien plus, de nouveaux instruments ont encouragé l'examen minutieux des motifs d'ordre privé et des renseignements personnels. Les contrôles internes et l'usage de systèmes internationaux d'échange de données informatiques, que nous avons déjà mentionnés, induisent un très haut degré d'intrusion dans la vie privée des personnes. Les nouvelles mesures sur l'immigration tendent à accorder moins d'attention aux droits légaux et donc à encourager l'érosion graduelle de la protection légale73 . Ainsi, les politiques d'immigration ont tendance à privilégier l'exclusion plutôt que l'inclusion, l'effacement de la distinction entre l'intérêt public et privé, et une érosion graduelle des droits légaux et de la protection. 1997 a été décrétée année européenne contre le racisme et la xénophobie74 . Le but essentiel de la Commission européenne était de parvenir à une application non-discriminatoire de la législation communautaire. Cependant, le problème est que la " législation communautaire " n'inclut pas les instruments légaux qui sont développés au titre du Troisième pilier, et les droits qui dérivent de la citoyenneté européenne (article 8 du Traité de l'UE) ne s'appliquent pas à ceux qui n'ont pas (encore) acquis la citoyenneté d'un des Etats membres. En d'autres termes, la Commission européenne et le Parlement européen sont pour le moment plutôt handicapés pour établir des instruments effectifs contre les politiques qui ont tendance à criminaliser les immigrants et les demandeurs d'asile.

23La coopération pour le renforcement de la loi est de plus en plus enchevêtrée avec les politiques d'immigration et d'asile, les instruments qui ont été récemment introduits pour lutter contre le crime international sont aussi employés contre l'immigration clandestine et les " fausses " demandes. En outre, la relation entre ethnicité et crime est entrée dans un processus d'européanisation. Enfin, les communautés qui revendiquent un renforcement législatif et les communautés académiques, criminologues y compris, partagent les mêmes conceptions quant à la relation entre le statut ethnique et le crime, et emploient des stratégies discursives similaires : la problématisation, la marginalisation, la généralisation la criminalisation. Ces stratégies discusives visant à renforcer le lien crime et migration. De ces rapports, traditionnellement forts, entre les débats des criminologues et les politiques nationales, on peut alors vraisemblablement tirer l'hypothèse que, tant que le processus d'intégration européenne continuera, l'échelle et la portée de cette connexion entre crime et migration s'élargira au niveau international.

Haut de page

Notes

1 Cet article est la synthèse de trois communications : " Rhetorics of Crime and Ethnicity on the Construction of Europe ", ECPR, Madrid, 18-22 avril 1994 ; " Immigrants, Asylum Seekers and Criminalisation : The Interaction between Criminal Justice Policy and Criminology ", Table ronde du CERI, Paris, 4-5 octobre 1996 ; " Immigration, Crime and European Cooperation ", Unisys, St-Paul de Vence, 16-18 octobre 1996.
2 Ethan Nadelmann, Cops Across Borders : The Internationalization of US Criminal law enforcement, University Park, Pennsylvania, Pennsylvania State Press, 1993.
3 Nous voulons parler du Titre VI du traité de l'Union européenne, qui couvre la coopération en matière de justice et d'affaires intérieures. Ayant un statut intergouvernemental, il bénéficie d'un regard minimal des institutions européennes. A la suite de la Conférence intergouvernementale, l'immigration, l'asile et les contrôles des frontières extérieures feront l'objet d'un Titre séparé, et le " Troisième pilier " est réduit aux affaires d'intérêt commun qui resteront sujettes aux décisions intergouvernementales. Le nouveau Titre VI du traité d'Amsterdam concerne la coopération policière et judiciaire en matière criminelle.
4 Par exemple dans leur regroupement sous la houlette d'Europol.
5 Didier Bigo et Rémy Leveau, L'Europe de la Sécurité Intérieure, rapport de fin d'étude pour l'Institut des Hautes Etudes de Sécurité Intérieure (IHESI), Paris, 1992.
6 Tony Bunyan, " Beyond state-watching " in Statewatching the new Europe. A Handbook on the European State, T. Bunyan (ed.), London, Statewatch, 1993, p. 33.
7 " The Quest for International Policing : Rhetoric and Justification in a Disorderly Debate " in M. Anderson and M. den Boer (eds), Police Co-peration across National Boundaries, London, Pinter, 1994, pp. 174-176, (surtout p.182).
8 Cf. Didier Bigo, Rémy Leveau, L'Europe de la Sécurité Intérieure, op. cit., p. 33.
9 Ibid., p. 29-30 ; voir également, D. Bigo, " Terrorisme, drogue, immigration : les nouvelles figures de l'insécurité en Europe ", in La peur de la peur, RIAC, Québec, 1994.
10 Sadako Ogata, " Refugees and Asylum-Seekers : a challenge to European immigration policy " in Towards a European Immigration Policy, The Philip Morris Institute for Public Policy Research, Bruxelles, oct. 1993, pp. 10-20.
11 Lode van Outrive et Johan Vanderborght, La structuration de l'échange d'informations dans le cadre de la collaboration policière internationale ; l'exemple de la Convention de Schengen et vice et versa[[Lors d'un débat au Parlement européen (10 mars 1997), le rapporteur du Comité sur les libertés civiles et les affaires publiques, Anne van Lancker, s'inquiétait du fait que le SIS était utilisé essentiellement comme une base de données sur les demandeurs d'asile, sans qu'on donne à ceux-ci la possibilité d'expliquer les raisons de leurs demandes.
12 Parlement européen, Comité d'enquête sur le racisme et la xénophobie, Report on the Findings of the Inquiry, (rapporteur Glyn Ford), Bruxelles-Luxembourg, 1991, p. 128. . Mais en termes de choix psychologique ou rationnel, on se demande rarement si un petit délinquant associe son délit à une image plus vaste d'une économie globale des drogues. Si, sociologiquement, l'argument fait sens, psychologiquement, il est peu pertinent.
13 Mais en termes de choix psychologique ou rationnel, on se demande rarement si un petit délinquant associe son délit à une image plus vaste d'une économie globale des drogues. Si, sociologiquement, l'argument fait sens, psychologiquement, il est peu pertinent.
14 Monica den Boer, " Moving between Bogus and Bona fide : The Policing of Inclusion and Exclusion in Europe " in R. Miles and D. Thränhardt (eds), Migration and European Integration : The Dynamics, qui cherchent à y entrer pour des raisons économiques. La Commission européenne a estimé que les immigrants économiques qui utilisent le biais du droit d'asile comme une ressource d'immigration alternative constituaient un large groupe de personnes. De manière similaire, les autorités estiment en général que les " faux " demandeurs d'asile forment désormais la majorité des demandeurs d'asile. Les expressions " fausse demande ", demande " manifestement infondée ", " clairement infondée " [[Le groupe Ad Hoc sur l'immigration emploie l'expression " demandes d'asile clairement infondées ", et les ministres en charge de l'immigration, lors de la réunion de Londres (30 novembre 1992), ont élaboré les concepts " pas de raison de crainte de persécution " et " fraude délibérée " ou " abus de la procédure de demande d'asile " : Press Release, London, 30 novembre 1992, 10518/92 (Presse 230) ; groupe Ad Hoc sur l'immigration, Report from the Ministers responsible for immigration to the European Council meeting in Maastricht on immigration and asylum policy, SN 4038/91 (WGI930), Bruxelles, 3 décembre 1991, p. 37.
15 M. M. J. Alberts, Operationeel vreemdelingentoezicht in Nederland, Arnhem, Gouda Quint (Onderzoek en Beleid, WODC) 1998, p. 16.
16 Hans-Ludwig Zachert, " Migratie en Criminaliteit " in Politeia, 21 décembre 1992, p. 15.
17 Michael Keith, Race, Riots and Policing. Lore and Disorder in a Multi-Racist Society, London, UCL Press, 1993, pp. 214-250. Voir aussi " New racism finds a Yardie stick ", The Independent du 3 novembre 1993.
18 John Solomos, " Constructions of Black Criminality : Racialisation and Criminalisation in Perspective " in Racism and Criminology, Dee Cook and Barbara Hudson (eds), London-New Delhi, Thousand Oaks, 1993, pp.118-135 et pp. 123-125.
19 NRC Weekeditie, 9 février 1993.
20 Supra, note 16.
21 Ronald Goldstock, " Organized Crime and Anti-Organized Crime Efforts in the United States : an Overview " in Organized Crime and its Containment. A Transatlantic Initiative. Cyrille Fijnaut and James Jacobs (eds), Deventer-Boston, Kluwer Law and Taxation Publishers, 1991, pp. 7-14
22 M. Anderson, Objectives and Instruments of Police Cooperation, Communication à l'ECPR Madrid Joint Session of Workshops, 17-22 avril 1994, Mimeo, p. 7 ; John Pitts, " Thereotyping : Anti-racism, Criminology and Black Young people " in Racism and Criminology, Cook and Hudson (eds), London-New Delhi, 1993, pp. 96-117, p. 109.
23 Coramae Richey Mann, Unequal Justice. A Question of Color, Bloomington and Indiapolis, Indiana University press, pp. 81-94.
24 Ronald Goldstock, op. cit., pp. 7-8 ; Zachert, op. cit., p. 14.
25 Hans Werdmölder and Peter Meel, " Jeugdige allochtonen en criminaliteit. Een vergelijkend onderzoek onder Marokkaanse, Turkse, Surinaamse en Antilliaanse jongens " in Tijdschrift voor criminologie, 3, jrg. 35, pp. 252-276.
26 Il faudrait mener des recherches dans les autres pays européens pour voir si un lien explicite y est établi entre appartenance à une communauté ethnique et implication dans le crime organisé.
27 Maarten van Traa, " Inzake de georganiseerde criminaliteit " in De georganiseerde criminaliteit in Nederland ", Frank Bovenkerk (ed.), Deventer, Gouda Quint, 1996, pp. 13-14.
28 I. Arkel, " Migranten en de georganiseerde criminaliteit " in Bovenkerk, op. cit., p. 110.
29 Voir également C. Fijnaut " Over de opzet, de uitvoering en de resultaten van het onderzoek " in Bovenkerk, op. cit., p. 23.
30 " D'une certaine manière, le crime transnational peut s'interpréter comme une réponse rationnelle à des occasions économiques (et souvent à des besoins économiques) " estiment P. Williams et C. Florez, " Transnational criminal organizations and drug trafficking ", Bulletin on Narcotics, General Issue on drug abuse ; vol XVLVI, n°2, 1994, p. 11.
31 P.C. van Duyne, " Definitie en kompaswerking " in Bovenkerk (ed.), op. cit., p. 57.
32 Peo Hansen, " Questions from somewhere - Who's Who in Attitude Research About " Immigrants " in Innovation, vol. 8, n° 2, 1995, pp. 191-199. Hansen y analyse la reproduction de la relation du " Nous " et du " Eux " à partir d'interviews réalisées pour une enquête " eurobarométrique " sur les attitudes envers les immigrés.
33 Jef Huysmans, " Migrants as a security problem : dangers of " securitizing " societal issues " in Miles and Thränhardt (eds), Migration and European Integration. The Dynamics of Inclusion and Exclusion, 1995, pp. 53-72.
34 Alison Young, Imagining Crime. Textual Outlaws and Criminal Conversations, London-Thousand Oaks-New Delhi, Sage Publications, 1996, p. 9.
35 Young, op. cit., p. 15.
36 Idem., p. 11.
37 Déclaration de la GOMERA sur le phénomène du terrorisme, Bruxelles 25 octobre 1995, 10899/95. La rédaction de cette déclaration montre que la définition du terrorisme se rapproche clairement de la définition du crime (international) organisé. Non seulement, elle mentionne que le terrorisme emprunte fréquemment des stratégies et des modèles au crime international organisé (quels qu'ils soient), mais elle fait aussi référence aux activités criminelles ordinairement associées au crime organisé, comme le blanchiment d'argent. La similarité de structure et d'activités du crime organisé et des organisations terroristes amène à formuler une stratégie de renforcement législatif presque identique. Les mots clés appliqués au crime organisé et au terrorisme sont " organisations ", " transnational " et " menace à la stabilité économique et sociale ". Ces deux crimes sont appréhendés comme un phénomène qui nécessite une approche préventive, proactive, soutenue par la collecte d'informations et/ou par des stratégies de police secrète. Sémantiquement, l'écart entre activités terroristes et crime organisé diminue graduellement.
38 Andreas Behnke, Dialogues on Difference. Theoretical Remarks on a security political problematique. Communication présentée à l'ECPR Joint Session of Workshop, Oslo, Norvège, 29 mars-3 avril 1996, Workshop on Security and Identity in Europe. Mimeo, p.7.
39 Andreas Behnke, op. cit., p. 16.
40 Ce paragraphe, et les deux suivants, s'inspirent d'un prochain article : M. den Boer, " The Fight Against Terrorism in the Second and Third Pillar of the Maastricht Treaty : Complement or Overlap ? " in Fernando Reinares (ed.), European Democracies against Terrorism : Government Policies and Supranational Cooperation, Dartmouth Publishing, à paraître.
41 Ole Waever, " European Security Identities " in Journal of Common Market Studies, vol. 34. n° 1, mars 1996, pp. 103-132.
42 M. Anderson, M. den Boer, P. Cullen, W. Gilmore, C. Raab and N. Walker, Policing the European Union. Theory, Law and Practice. Oxford, Clarendon Press, 1995, p. 176.
43 Barry Buzan, People, States and Fear. An Agenda for International Security Studies in the Post-Cold War Era. New York, 1991, p. 194. Cf. également Malcolm Anderson et al., op. cit., 1995, p. 176.
44 Neil Walker, " The International Dimension " in Accountable Policing : Effectiveness Empowerment and Equity, Robert Reiner and Sarah Spencer (eds), London, 1993, pp. 113-117.
45 Malcolm Anderson et al., op. cit., p. 177.
46 Alison Young, op. cit., p. 7.
47 P. Williams and C. Florez, op. cit., p. 13.
48 Les réseaux ethniques fournissent " couvertures, recrues et les liens transnationaux qui facilitent l'activité criminelle ", Phil Williams, " Getting Rich and Getting Even " in Transnational Threats in the Twenty First Century, Mimeo, p.7.
49 P. Williams and C. Florez, op. cit., p. 20 : " En Allemagne, le statut peu élevé des travailleurs turcs invités signifie que les occasions et les récompenses offertes par les organisations criminelles turques qui trafiquent de l'héroïne venue d'Asie du Sud-Ouest vers l'Europe occidentale, sont très attractives. Même une simple participation ou un engagement marginal peut rapporter beaucoup plus que ce que l'on pourrait obtenir de l'économie licite. "
50 G. J. N. Bruinsma, " De Methoden en bronnen van onderzoek naar georganiseerde criminaliteit " in Andreas Bovenkerk (ed.) op. cit., p. 63-71.
51 G. J. N. Bruinsma, op. cit., p. 67.
52 J. Fiselier, " Enige opmerkingen over strategie en methoden van onderzoek " in Andreas Bovenkerk (ed.), op. cit., p. 73-80.
53 Andreas Bovenkerk, " Ons kennisniveau ontrent de traditionele vormen van georganiseerde misdaad " in Andreas Bovenkerk (ed.), op. cit., p. 92-93.
54 Ibid., p. 98.
55 D. J. Korf, " De Octopus en de mier " in Andreas Bovenkerk (ed.), op. cit., p. 105.
56 Ibid., p. 106. Voir aussi H. A. Holthuis, " Op weg naar een deugdelijke criminele politiek " in Andreas Bovenkerk (ed.) op. cit., p. 118.
57 Des critiques ont noté en Grande-Bretagne que les allégations d'abus de bénéfices additionnels, et l'immigration en soi, étaient des " traits sociaux marginaux, mais qui commandaient un intérêt disproportionné ainsi qu'une mauvaise distribution des efforts administratifs et des autres ressources publiques ". Cf. Robert Moore and Tina Wallace, Slamming the Door. The Administration of Immigration Control, London, 1975, Martin Robertson, p. 114.
58 Dans son rapport de 1990 sur l'intégration sociale des immigrants, la Commission européenne écrit que l'emploi clandestin est un trait inquiétant car producteur de précarité et d'insécurité, et qu'il rend difficile l'intégration des immigrants dans un cadre régulier. L'emploi clandestin est aussi appréhendé comme un poids qui pèse sur les conditions de travail du groupe qui perçoit un revenu régulier. Cf. Monica Den Boer, op. cit., p. 99.
59 Monica Den Boer, op. cit., p. 98.
60 Frits W. Hondius, " Civil Status Fraud " in Towards a European Immigration Policy, G. D. Korella and P. M. Twomey (eds), Brussels European Interuniversity Press, 1993, pp. 79-84.
61 Ibid., p. 80.
62 Ibid., p. 80.
63 Malcolm Anderson et al., 1995, op. cit., chap. 1.
64 Phil Williams, " Getting Rich and Getting Even " in " Transnational Threats in the Twenty First Century ", Mimeo, p. 7.
65 Cf. P. Williams and C. Florez, op. cit., pp. 20-21.
66 Cf. Résolution sur les limites à l'admission de ressortissants à la recherche d'emploi des pays-tiers dans les Etats membres (OJ C 274), 19 septembre 1994 ; Conclusions concernant les conditions de réadmission par les Etats membres de personnes résidant illégalement sur le territoire d'un des Etats membres (31 octobre 1994) ; Recommandation du 22 décembre 1995 sur l'harmonisation des moyens de lutte contre l'immigration et l'emploi clandestins et l'amélioration des moyens de contrôle conséquents (OJ C 5, p. 1) ; Recommandation du 22 décembre 1995 sur l'action concertée et la coopération dans la mise en œuvre des mesures d'expulsion (OJ C 5, p. 3) ; Résolution sur les demandes d'asile manifestement non fondées (1992, SN 4822/92 WG 1 1282 AS 146).
67 Cf. également Monica Den Boer, op. cit., pp. 95-96.
68 Cf. Frances Webber, Crimes of Arrival : Immigrants and Asylum Seekers in the New Europe, Statewatch Publications, 1996, p. 1.
69 Doc A2-227/86, OJ 1987 C 99/167.
70 Cf. T. Hoogenboom, T. and H.U. Jessurun d'Oliveira, " The Position of Those who are not Nationals of a Community Member State ", communication présentée à la Conférence sur les droits de l'homme et la Communauté européenne : Vers 1992 et au-delà, Strasbourg 20-21 novembre 1989, p. 63.
71 Amnesty International, Racist Torture and Ill-Treatment by Police in Western Europe, EUR, 3 janvier 1992, novembre 1992.
72 Monica Den Boer, " Immigration, Internal Security and Policing in Europe ", Working paper VIII in A System of European Police Co-operation in 1992, Department of Politics, University of Edinburgh, 1993, p. 66 ; " Asielzoekers snel inperken ", Trouw, 16 mars 1994.
73 Roel Fernhout and Henk Meijers, " Asylum " in A New Immigration Law for Europe, The 1992 London and 1993 Copenhagen Rules on Immigration, Nederlands Centrum voor Buitenlanders / Standing Committee of experts in international immigration, refugee and criminal law, Utrecht, 1993, pp. 9-10.
74 Commission des Communautés Européennes, Communication from the Commission on Racism Xenophobia and Anti-Semitism and Proposal for a Council Decision designating 1997 as European Year against Racism, Brussels, 13 décembre 1995, COM (95) 653 final.
Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Monica den Boer, « Crime et immigration dans l'Union européenne »Cultures & Conflits [En ligne], 31-32 | printemps-été 1998, mis en ligne le 16 mars 2006, consulté le 19 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/conflits/551 ; DOI : https://doi.org/10.4000/conflits.551

Haut de page

Auteur

Monica den Boer

Monica den Boer est chercheur à l’European Institute of Public Administration, Maastricht (NL)

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search